Rebecca – Daphné du Maurier

C’est l’histoire d’un rêve qui vire au cauchemar. L’histoire de plusieurs personnages qui s’accrochent à leurs rêves, leurs fantasmes, leurs ambitions malgré l’horreur que cela induit. Du mal qui peut émerger à l’image même du personnage central, Rebecca. La défunte de M. de Winter qui même morte noyée, brille par sa présence dans les mémoires de chacun. Les souvenirs, sont les acteurs principaux. Même plus que les caractères que l’on découvre.

« Si seulement on pouvait inventer une technique qui permette de mettre les souvenirs en flacon, comme les parfums. Qui les empêche de s’évaporer, ou de virer. Alors quand on voudrait on pourrait déboucher le flacon, et on aurait l’impression de revivre l’instant. »

Alors que M. de Winter arrive à Monte-Carlo dans le but de se changer les idées après un drame (sa femme est morte noyée), il rencontre contre son gré Mme Van Hooper une riche arrogante qui s’intéresse aux autres d’une manière presque maladive. Elle est accompagnée d’une jeune dame de compagnie dont elle loue justement l’amitié. Cette jeune femme (dont on ignore le nom contrairement à la défunte) noue une relation complice avec M. de Winter qui finit par la demander en mariage. L’histoire pourrait s’arrêter là mais c’est là que tout le drame commence.

La jeune épouse vient d’un rang social/économique inférieur mais est également bien plus jeune que lui. J’ai déduit que cet écart était approximativement d’une vingtaine d’années. Mais les différences ne s’arrêtent pas là puisque cette nouvelle épouse est également d’une timidité et d’une introversion extrême. C’est un personnage qui occupe la place, le rôle qu’on veut bien lui donner. Elle est également décrite comme ennuyeuse et j’avoue que même moi je l’ai trouvé plutôt… sans intérêt. C’était peut-être également le souhait de l’autrice de transmettre ce sentiment. Une fois marié, le couple s’installe dans la luxueuse demeure de M. de Winter; le Manderley. Un lieu réputé pour sa beauté dont les murs sont imprégnés du souvenir indélébile de Rebecca. On découvre au fil des pages que peu de choses ont changé à Manderley au point que la jeune épouse se doit de marcher dans les traces laissés par celle qui la précédée. S’installe petit à petit une atmosphère lourde, humide et toujours ambigue.

« Elle avait une beauté impérissable, et un sourire qu’on ne pouvait oublier. Quelque part, sa voix retentissait encore, tout comme le souvenir de ses paroles. Il existait des lieux qu’elle avait visités, et des objets qu’elle avait touchés. Peut-être des placards renfermaient-ils les vêtements qu’elle avait portés, encore imprégnés de son parfum. Dans ma chambre, sous mon oreiller, j’avais un livre qu’elle avait tenu dans ses mains, et je l’imaginais courbée sur cette page blanche, souriant tout en écrivant, et secouant son stylo. « Pour Max. Rebecca. »

Plus que l’intrigue, la force de livre est dans l’ambiance qu’il induit. La psychologie de ses personnages promet qu’une fois le livre terminé, la première chose que vous ferez sera d’aller relire les premières. Pourquoi on fait ce que l’on fait? Pourquoi on garde ce que l’on garde? Qu’est-ce qu’on est prêt à accepter au nom de l’amour? De sa réputation? De sa loyauté? Ce livre pourrait être un sujet d’étude afin d’ouvrir des pistes de débat. J’ai également regardé l’adaptation sur Netflix (j’aurais certainement du privilégier Hitchcock) et l’adaptation est très pauvre, juste quelques belles scènes d’un point de vue purement esthétique. C’est une histoire qui se lit car tout se passe entre les lignes. On est plus dans la suggestion que dans ce qui se passe concrètement. Décrire ce livre comme une suite d’événements reviendrait à jeter plus de la moitié de l’oeuvre. C’est aussi un livre qui mérite d’être assimilé et ressenti. Les descriptions botaniques ajoutent de la fraîcheur et pour peu on en sentirait les parfums. Le décor est très bien travaillé, c’est très réaliste et très sauvage à la fois. Cela fait du bien surtout dans une lecture dans lesquelles les personnages sont dans une infinie retenue.

Dans un premier élan de curiosité vous pourriez lire ce livre avec impatience comme je l’ai fait et presque passer à côté de sa saveur. Mais ce n’est clairement pas un polar mais plus un roman psychologique où l’on vient disséquer les souvenirs et les évènements. Pour moi ce fut une lecture plutôt lente et j’ai du un peu prendre mon mal en patience. Mais c’est une très belle immersion pour une première lecture de cette autrice. De plus elle s’accordera parfaitement avec les jours pluvieuses qui nous attendent.

BL Métamorphose – Kaori Tsurutani

Les japonais ont l’art de transmettre la beauté des plaisirs simples de la vie. Que ce soit dans des films ou dans des livres, ils savent exprimer la douceur légère, cosy et rassurant à la fois. Ce manga est comparable à une bonne tisane chaude. Dans le genre seinen/tranche-de-vie, on assiste ici à une amitié naissante entre une étudiante Urara et une dame âgée Yuki, suite à la découverte d’une passion en commun; les mangas boy’s love. Comprenez les mangas qui parlent d’histoire d’amour entre deux hommes.

Dans ce genre de lecture ce que j’apprécie particulièrement c’est que ce qui compte réellement ce n’est pas tant la fin elle même mais ce qui se déroule tout au long des pages. C’est aussi l’intérêt de lire un manga tranche-de-vie. Ainsi la lecture se fait plaisir au fil des pages sans se hâter pour en connaître la fin. D’ailleurs une des phrases qu’on peut lire dans le livre dit; on hâte de découvrir la fin et pourtant on a pas envie de le terminer. Ou quelque chose du genre. Comme j’ai rendu le livre à la bibliothèque, je ne me souviens plus mot pour mot mais cela dit, la lecture tranche-de-vie se fait à l’opposé de leur lecture à elles – le manga BL – qui lisent une histoire d’amour. Il est vrai que dans les histoires d’amour on veut toujours connaître la fin. Ce qui n’est pas le cas de cette histoire d’amitié et cette dimension est amplifiée par le fait que Yuki, la dame âgée est proche de sa fin de vie. Au point qu’elle n’est pas sûre d’être là pour la lecture des prochains tomes de son manga.

Je dois avouer cet aspect m’a plutôt attristée et si vous avez lu mon article En vie qui parle du temps qui passe vous comprendrez que les mots ont réellement trouvé un sens en moi. Il y’a en effet deux rythmes de vie dans ce manga. Celui de l’étudiante pour qui tout va trop vite et qui doit prendre des décisions pour sa vie à venir. Et celui pour Yuki qui doit préparer la fin de sa vie et qui ralentit au fil des pages. Pourtant c’est en cela que cette histoire est intéressante car on ne peut que constater à quel point les deux générations ont besoin l’une de l’autre pour avancer. Malheureusement, ce lien est souvent rompu comme si elles s’opposaient tandis qu’elles ne sont que la continuation l’une de l’autre.

Cette lecture m’a fait beaucoup de bien car elle parle de ce qui est intemporel à travers les âges ou les barrières. On parle là de l’essentiel en partant de quelque chose qui se veut « superficiel » un manga boy’s love pour jeunes filles. Et je me suis dis au fil de ma lecture que c’est peut-être cela qu’on doit trouver, nos points en communs car c’est ainsi que l’on se relie à l’autre. Je pense que le fait d’avoir un boy’s love comme manga en commun dans leur lecture (parce que oui au final ça aurait pu être tout autre chose) c’est pour symboliser la ressemblance. C’est chercher à se relier à travers nos ressemblances plutôt que de nous diviser par nos différences.

Ce livre était bien sûr en noir blanc comme la plupart des mangas mais quand j’y repense je le revois toujours en couleurs. Ce qui est aussi dû à la qualité du dessin je présume. Ce fut donc une de mes premières lectures de manga pour adulte (la dernière fois que j’en ai lu je devais être enfant) les 4 tomes ont été terminés en 1 semaine à peine. Bien sûr à la fin, cela m’a fait l’impression de dire au revoir à des amis tant j’étais prise dans l’histoire. Je serais pas étonnée si je finissais par les réemprunter juste pour le plaisir.

Big Magic

Paru sous le nom de Comme par magie; vivre sa créativité sans la craindre, ma dernière lecture est une telle pépite que j’ai voulu en faire un article plus long qu’un simple post sur insta. Alors personnellement je l’ai lu en anglais pour la simple raison que je suis toujours en phase d’apprentissage de cette langue et bien que je sois amenée tous les jours à la pratiquer dans mon travail, j’aimerais améliorer mon niveau. Du coup, quoi de mieux que de le faire avec quelque chose que j’aime telle que la lecture?

Une idée est une entité qui cherche à s’incarner à travers nous.

Et c’est peu dire… Ce livre respire les bonnes ondes, la légèreté et une fraîcheur incroyable! On comprend très vite le propos d’Elizabeth Gilbert – qui est aussi l’écrivaine du bestseller « Mange, prie, aime » – qui semble avoir fait de la joie une philosophie de vie. Elle nous présente non seulement les différentes facettes des personnes créatives ou à l’âme artistique, mais elle apporte aussi des exemples de pièges dans lesquels on peut tomber lorsqu’on aime créer. Son approche de la créativité est presque enfantine, tant elle semble détachée de la notion de souffrance qui gravite autour des artistes. Dans mon cas, je me suis reconnue dans certaines réflexions et les sagesses de ce livre m’ont apprises que j’approchais souvent l’écriture avec beaucoup trop d’attente. Cette tendance à mettre la barre très haute et finalement transformer le côté léger, instinctif, amusant de l’écriture en quelque chose de trop mental. Bien sûr, je fais surtout allusion à l’écriture créative et non à des textes plus concrets, tels que des présentations ou comme ici, un retour de lecture. Ce qui ressort aussi dans ce livre, c’est de faire la différence entre ce qui nous nourrit et ce qui nous détruit. Quand on commence à confondre le fait de se tuer à la tâche et la persévérance.

Pourquoi sommes-nous si attachés à la souffrance? Pourquoi il faut absolument saigner pour avoir du mérite?

Et que retire-t-on comme satisfaction d’une création qui a été fait dans la souffrance? Peut-on vraiment en tirer du plaisir? Je veux dire un plaisir sain. Je ne le crois pas. Et encore moins depuis que j’ai lu ce bouquin. On a tellement associé le mérite avec la difficulté que quand une chose est faite avec aisance – et je ne parle de facilité – on culpabilise. On sabote ce qu’on a produit, ou encore on y accorde aucune valeur ce qui est très dommage. Une personne très proche dans mon entourage avait un projet artistique qui lui a pris des années avant de voir le jour. Connaissant son perfectionnisme, je peux assurer que le moindre petit détail de sa création lui valu au moins 3 gouttes de sueur sur le front. Je sais aussi que ce projet a été crée dans la souffrance. Et bien évidemment sa création ne lui a pas amené de la joie. Une satisfaction inimaginable certes mais pas vraiment de bonheur. Pas parce qu’il était raté, loin de là. Sa création était parfaitement travaillée, mais parce qu’il a mis dedans sa douleur, sa souffrance. Alors oui, un grand soulagement s’en est suivi mais je crois que ce n’était pas tout à fait ce qu’il attendait. Aujourd’hui, je sais qu’il ne créée plus du tout avec cet état d’esprit et ce comportement destructeur est derrière lui. Il a compris qu’il peut créer tout en prenant du plaisir à le faire.

La notion du plaisir.

Je reprendrais ici la phrase de Christian Junod qui propose cette idée; une personne devrait être payée à la hauteur du plaisir qu’elle prend à faire son travail. N’est-ce pas merveilleux? N’est-ce pas logique? Sans viser le travail, je dirais même qu’en général on fait les choses pour les mauvaises raisons et on est même pas au clair de l’intention qu’on y met. Je suis la première à monter dans ce bateau là. Plus d’une fois, j’ai fait des choses pour les mauvaises raisons, en me dupant, en me convaincant que je le faisais pour moi et rien d’autre. C’EST FAUX! Car quand je n’obtenais pas les résultats escomptés, j’étais réellement frustrée. Parce que je n’avais pas su dire clairement ce que je voulais. Parce que j’estimais que faire quelque chose pour de la reconnaissance c’était pas bien. Je voulais pas baisser dans mon estime alors je disais le faire pour moi, tout en le faisant pour les autres. Le problème c’est ça. Tout au long du processus de création, on se juge, on s’identifie trop à notre oeuvre et on arrive pas à faire la part des choses. Alors ce livre dit; Chill man… Ta vie ne dépend pas de ça! Tu n’es pas ta chanson. Tu n’es pas ton texte. Tu n’es pas ton tableau. Calme… c’est juste des créations. Y’a pas mort d’homme, amuse-toi avec ça et arrête avec tes airs d’artiste maudit qui prend tellement au sérieux son drame qu’il ne se rend pas compte à quel point il est superficiel. Oui ce fut une longue phrase. Finalement, au moment où l’on se surprend à se tuer au nom de quelque chose, c’est peut-être qu’il est temps de se retirer et d’aller chercher le plaisir ailleurs. Histoire d’y reprendre goût.

Big Magic. Elizabeth Gilbert. Juste Canon.

10 ans de développement personnel: le bilan

Effectivement cela fait déjà une décennie que je me suis penchée sur mes premiers livres de développement personnel. Comme le temps passe vite… Alors qu’à l’époque cela représentait une niche de livres, voilà qu’au bout de toutes ces années ce n’est plus d’un effet de mode dont on parle mais bien d’un courant de pensée. La tendance est devenue une philosophie, entrainant des millions de personnes sur son passage. Entre les livres, les conférences, les ateliers et les stages qui n’a jamais entendu parler du « DP »?

Lire la suite »

L’homme nu – Marc Dugain & Christophe Labbé

Au début j’ai eu un peu peur de m’ennuyer avec ce livre. Malgré l’intérêt que j’ai ressenti en le feuilletant en librairie, j’ai pensé qu’on y abordait uniquement les conditions d’utilisations des réseaux sociaux et les débats autour de ces derniers. J’étais en faite loin du compte…

Lire la suite »

Jacqueline Kelen – L’esprit de solitude

Alors que viens de terminer ce livre, me voilà déjà en train d’écrire. Je voulais le faire à chaud, pendant que je suis encore pleinement dans l’émerveillement à l’issue de ma lecture. J’ai l’impression d’avoir été prise dans une danse, qui a durée plusieurs jours et que je viens de me poser. Encore essoufflée, mes joues sont toutes rouges et mon coeur palpite. Cet ouvrage m’a fait virevolter dans tous les coins de mon esprit, en le transformant, en une piste de danse infinie. Tel les déserts qui sont si souvent cités par Kelen.

Lire la suite »

Djamila Ribeiro – La place de la parole noire

« Mettre un terme à l’invisibilité de ces sujets et leur offrir un regard intersectionnel et fondamental pour éviter les analyses simplistes et rompre avec cette tentation de l’universalité qui exclut. L’hisoire nous a montré que l’invisibilité tue, ce que Foucault appelle le « laisser vivre ou laisser mourrir ». Il est essentiel de prendre conscience que, quand les individus noirs revendiquent le droit d’avoir une voix, ils revendiquent le droit à la vie. »

C’était un jour de blues et mon programme était très simple; faire la sieste, plonger dans les livres et dans le café. Après un long moment passé à la librairie, je me suis rendue à la bibliothèque car quel est l’endroit le moins fréquenté durant les vacances d’été? J’ai vite eu ma confirmation en marchant à travers les rayons silencieux, remplis de livres et vides de lecteurs. Tant mieux, cela m’allait très bien.

Lire la suite »

Habiter un petit espace avec sérénité

« Il existe, de par le monde, des habitats minuscules et extrêmement confortables, beaux et idylliques. Si avoir un toit à soi est une priorité, sa surface, elle, est secondaire:car paradoxalement, plus un habitat est petit, plus il peut apporter de joie. » -Dominique Loreau

Quand on déménage, il est d’usage d’opter pour un habitat plus grand. Plus spacieux, plus moderne, avec plus de rangements etc. Ces changements, vont souvent de pair avec l’évolution de son/ses habitants. Quand la famille s’agrandit ou qu’on gagne d’avantage, on se projette volontiers dans un plus grand espace. Dans mon cas, j’ai fait le chemin inverse, j’ai quitté mon appartement (taille moyen) pour un appartement plus petit. Cela fait partie des choix que j’ai du faire pour une réorientation complet de ma vie. À ce moment, cela faisait quelques années que j’avais lu ce livre de Dominique Loreau. À l’époque, j’aimais déjà concevoir mon intérieur avec minimalisme. Ce critère a été décisif pour me projeter dans un plus petit espace.

Lire la suite »